Nous ne savons rien d'autre sur cet Ingelbert, sauf qu'il possédait au moins une maison à Gallardon. Son fils Hervé apparaît dans plusieurs documents anciens sous le nom de "Herveus Ingelberti", c'est à dire Hervé fils d'Ingelbert. Le Dr Gillard l'a trouvé d'abord dans un chartrier de l'abbaye de Marmoutier : Hervé y est cité parmi les compagnons de Gui de Gallardon, lors d'une donation faite en 1113 par Foulques d'Anjou en remerciement de l'accueil des moines de Marmoutier lors d'une expédition guerrière.
Cet Hervé est très souvent cité dans le Cartulaire de l'abbaye de Josaphat (3). On l'y appelle plusieurs fois "Herveus Ingelberti", mais aussi "Herveus Galardonensis", Hervé le gallardonnais, à ne pas confondre avec Hervé de Gallardon, seigneur de ce lieu. Cet Hervé est présenté comme 'miles' (chevalier), fils et héritier d'Ingelbert. Mais, après avoir été lui aussi seigneur de Boigneville, il se fait moine vers 1130. Et, comme cela se faisait beaucoup, il donne une partie de ses biens à l'abbaye qui l'accueille : ce qu'il possède à Gallardon, des terres à Louville et Ouarville, et des terres à Moineaux à l'exception en ce lieu d'un moulin et de terres attenantes qu'il donne à sa soeur Ameline et au mari de celle-ci, Bernard Champelin.
Hervé de Boigneville est très actif au sein de son abbaye, dont il devient "camerarius" (chambrier), c'est à dire le principal intendant. Il participa à la recherche active de donations à l'abbaye. On voit même un moine envoyé au chevet d'un mourant pour obtenir de lui un legs. Mais, lors de ces donations ou legs, on pouvait s'inquiéter de l'attitude d'héritiers présomptifs se sentant lésés, ou du seigneur dominant qui perdait toute possibilité ultérieure de récupérer les terres données (ce qu'il pouvait faire par exemple en cas de deshérence ou de saisie féodale). Il fallait donc que l'abbaye se protège, en un temps où la force faisait souvent la loi. On organisait donc des cérémonies officielles de donation, où les héritiers présomptifs et les seigneurs devaient donner leur consentement, en présence de nombreux témoins : cela devait garantir l'application des décisions prises. Ces listes interminables de témoins ont un précieux avantage pour nous aujourd'hui : on y voit défiler toutes les personnes qui comptaient à l'époque ! Et même parfois plus, puisqu'il arrive qu'on mentionne comme témoin un valet de chambre ou un concierge ... A partir de 1145, le cartulaire de Josaphat ne mentionne plus Hervé, et en 1151 un nouveau chambrier fait son apparition (Drogo). Hervé est sans doute mort entre ces deux dates. Mais il n'était plus seigneur de Boigneville depuis 1130 environ.